Sous le ciel lourd de Thiaroye, cette nuit sans étoiles,
Les héros dormants encore, épuisés par l’histoire,
Soudain, des coups de canon brisent le voile,
Les réveillant en sursaut, dans le noir et l’émoi.
Ces hommes, fraîchement rentrés de terres lointaines,
Portaient en eux la fierté d’avoir sauvé des vies,
D’avoir arraché la France des griffes des nazis,
Au prix de leurs sueurs, de leur sang, de leur survie.
Ils ont marché dans l’épreuve des combats en France,
Défendant des terres qu’ils ne connaissaient pas,
Face aux balles, aux feux, aux nuits de souffrance,
Leur sang coulant sur des champs qui n’étaient pas les leurs.
Sous le drapeau d’une patrie qu’ils n’ont jamais connue,
Ils ont tenu bon, dignes dans la tourmente,
De Toulon à Chasselay, la mort en embuscade continue,
Leur bravoure éclatante sous la mitraille brûlante.
Mais le retour fut amer, un silence lourd les accueille,
Dans le camp de Thiaroye, des promesses bafouées,
Leur dû, un pécule, rien que des écueils,
Un droit refusé, une dette rejetée.
Alors ils se sont levés, non plus en soldats mais en hommes,
Réclamant justicia, dignité et reconnaissance,
Mais la France, sourde, dans sa froideur assomme,
La nuit du 1er décembre 1944, elle scelle leur sentence.
Des chars grondent, le feu crépite,
Le camp devient tombeau sous le ciel noirci,
Thiaroye est en flamme dans une aube maudite,
Et l’histoire s’efface sous le cri des canons.
Ô vous, braves tirailleurs, âmes sacrifiées,
Vous qui avez donné votre vie pour une patrie ingrate,
Nous portons aujourd’hui vos noms exaltés,
Dans nos cœurs, dans nos chants, votre mémoire éclate.
La terre d’Afrique pleure ses fils arrachés,
Vos sacrifices brûlent dans nos mémoires, éternels,
Face à l’injustice, votre histoire nous a enseigné,
Que les héros, souvent, meurent sous un ciel infidèle.
Thiaroye, sanctuaire du sang versé,
Que vos martyrs reposent dans la dignité,
Et que jamais ne s’efface le souvenir blessé,
Des tirailleurs tombés pour la justice.
Par Dr. Mamadou Lamine KEITA, ancien ministre
